Usaid: l’impact dévastateur du retrait américain

Donald Trump signe un décret officialisant le retrait des Etats-Unis de l’Organisation mondiale de la santé, le 20 janvier 2025, à la Maison-Blanche. / © 2025 / The Trump White House
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Donald Trump signe un décret officialisant le retrait des Etats-Unis de l’Organisation mondiale de la santé, le 20 janvier 2025, à la Maison-Blanche.
© 2025 / The Trump White House

Usaid: l’impact dévastateur du retrait américain

Choc
Avec le gel soudain des subsides de l’agence américaine Usaid, les ONG se retrouvent en première ligne face à une crise globale sans précédent.

Le 20 janvier dernier, Donald Trump a déclenché un véritable séisme humanitaire en signant un décret présidentiel gelant l’intégralité des fonds destinés à l’aide au développement. En première ligne: l’Usaid, l’agence américaine de coopération internationale, dont les activités ont été suspendues avec effet immédiat. Créée en 1961, l’Usaid gérait un budget annuel colossal de 42,8 milliards de dollars, représentant à elle seule 42% de l’aide humanitaire mondiale. L’arrêt brutal de ses activités prive aujourd’hui des millions de personnes de l’accès à des services essentiels, notamment dans les domaines de l’éducation, de l’agriculture et dans la lutte contre l’insécurité alimentaire.

ONG sous pression

En Ukraine et en Afrique subsaharienne, les conséquences ont été immédiates: approvisionnements médicaux interrompus, projets d’assainissement de l’eau arrêtés et structures sanitaires en péril. Plusieurs ONG et agences de l’ONU tirent la sonnette d’alarme. L’Unicef redoute une explosion de la malnutrition infantile, une baisse de la scolarisation et une hausse des maladies évitables. Du Kenya à l’Afrique du Sud, la lutte contre le Sida est ralentie. A ces drames humains s’ajouteront des conséquences écologiques alarmantes : recul de la protection de l’environnement et affaiblissement des programmes de reforestation, de gestion de l’eau et de biodiversité. 

L’Entraide protestante suisse (EPER) prévoit des licenciements en raison du retrait de l’Usaid, qui devait financer certains projets. Selon Bernhard Kerschbaum, directeur de la coopération mondiale, «une centaine de personnes ont travaillé sur ces projets, mais le manque de ressources empêche de maintenir tous les emplois». Face à la catastrophe, plusieurs ONG ont interpellé le conseiller fédéral Ignazio Cassis. Berne doit-elle pallier le retrait américain? Une question qui divise le Conseil fédéral, alors que la Suisse elle-même a réduit son budget d’aide internationale ces dernières années.

L’Europe se désengage

Bien qu’il ait provoqué l’indignation et des recours juridiques, l’arrêt brutal de l’Usaid n’est pas le premier signal de retrait des grandes puissances de l’aide au développement. Celui-ci a commencé après la pandémie du Covid-19. Et la tendance ne fait que se confirmer. Comme le souligne un article du Monde du 14 novembre 2024, «L’Europe se désengage fortement de l’aide au développement, sous la pression croissante de l’extrême droite. La France enregistre la baisse la plus spectaculaire avec une réduction de 34% de son budget. L’Allemagne, la Suède et les Pays-Bas (–30%) suivent. Ce recul, alors que les pays les plus pauvres affrontent des crises majeures, marque une rupture avec la tradition solidaire de l’Europe». Face à l’instabilité de la conjoncture globale, «le gouvernement suisse privilégie une approche prudente et reste en position d’observation», confie une haute responsable du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Berne confirme son soutien à la Genève internationale en proposant une hausse de 5% du crédit qui lui est alloué, soit 1,2 million de francs supplémentaires. Malgré les demandes du secteur, qui réclame un soutien de 1 milliard de francs, la Confédération reste mesurée dans son engagement financier. 

La situation a aussi suscité une réaction immédiate de l’ONU, qui a annoncé, le 6 mars, un déblocage de 110 millions de dollars pour soutenir les pays les plus touchés. Tom Fletcher, son secrétaire général adjoint pour les affaires humanitaires, a rappelé «l’urgence de diversifier les sources de financement et de transférer davantage de pouvoir aux acteurs locaux pour gérer les crises sur le terrain».